ENTREVUE. À la fin des années 1980, alors que le marché était dominé par les géants Labatt, Molson et O’Keefe, il fallait être téméraire pour démarrer une microbrasserie; «peut-être fou», lance même à la blague Peter McAuslan. Lui et sa conjointe Ellen Bounsall ont pourtant ouvert dans Saint-Henri, en 1989, la Brasserie McAuslan, la première qui a offert aux consommateurs sa bière en bouteilles.
«Au printemps 1989, c’était la seule bière indépendante des grands brasseurs disponible dans les dépanneurs à Montréal, relate-t-il. Nous étions les premiers à avoir une chaîne d’embouteillage.»
Les amateurs pouvaient enfin apporter à la maison une caisse de St-Ambroise. Jusque-là, les bières des microbrasseries étaient uniquement disponibles en fût dans les broues-pubs.
Pour le couple qui a ouvert la porte par laquelle se sont engouffrés par la suite des dizaines de petits brasseurs, tout a commencé avec l’envie d’offrir quelque chose de différent.
«Nous avons décidé de brasser une bière de caractère avec plus de goût, indique Peter McAuslan. Notre objectif était de créer à l’intention des consommateurs une bière dans le style de celles qu’on trouvait au Québec durant les années 1930-1940.»
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Celui qui a vendu l’entreprise en 2013 aux Brasseurs RJ évoque notamment la Black Horse disponible durant la première moitié du XXe siècle.
Réaction formidable
Peter McAuslan s’y connaissait déjà en bière quand il a quitté son poste d’administrateur au collège Dawson pour démarrer la brasserie. «Très jeune, je me suis intéressé à l’industrie de la fermentation», souligne-t-il.
À l’époque, les microbrasseurs ne se bousculaient pas aux portes du gouvernement provincial. «Pendant une longue période, Québec n’avait pas émis de permis de brasseur, se remémore M. McAuslan. Il y avait beaucoup d’étapes avant de l’obtenir.»
Dès le début, le brasseur a constaté que les papilles des Québécois étaient mûres pour autre chose.
«La réaction des consommateurs a été formidable pour nos produits, se souvient-il. Nous faisions la livraison avec un petit camion. Quand les automobilistes nous voyaient passer, ils klaxonnaient. Il y a des gens qui laissaient une note de félicitations dans le pare-brise.»
Une mesure fiscale déterminante
Peter McAuslan est encore surpris aujourd’hui de l’explosion du nombre de microbrasseries. «Personne n’aurait imaginé la croissance que nous avons vue ou cours des 25 dernières années», confie-t-il.
Pour lui, la réduction de la taxe spécifique sur l’alcool en vigueur au Québec pour les microbrasseries depuis 2000 a joué un rôle déterminant dans leur émergence.
«Les efforts de l’Association des microbrasseries du Québec ont entraîné une modification du montant de taxes payable par les petits brasseurs, explique-t-il. Au début, on payait des taxes sur notre production au même niveau que Labatt et Molson.»
Aujourd’hui, plus d’un quart de siècle après le lancement de la St-Ambroise, et même s’il s’est retiré des affaires, Peter McAuslan est toujours aussi passionné par le brassage de la bière. Il s’amuse chez lui à élaborer de nouvelles recettes, pour son plaisir, faisant même pousser son propre houblon et son seigle.
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